Lapsus 8/03/2023
Spécial colloque - La parole dans la clinique de demain. Etat des lieux d'une dépathologisation et perspectives
Empowerment
Par Emilie Fernandez
L’hôpital psychiatrique, comme lieu d’accueil privilégié de la souffrance psychique, tend à disparaître au profit d’un lieu de soin “comme les autres”, c'est-à-dire un lieu qui accueille des usagers. Ce virage sémantique n’est pas anecdotique, il signe au contraire le virage dans les missions de la psychiatrie, qui s’éloigne du soin pour se rapprocher de la “promotion de la santé”. On ne vise plus un lien transférentiel opérant pour un sujet mais plutôt un accompagnement qui permet à un usager/citoyen d’utiliser tout son potentiel en faisant notamment valoir ses droits. C’est l’essence même du concept d’empowerment, qui est à la racine de plusieurs dispositifs, tels que les groupes d’entendeurs de voix, les directives anticipées en psychiatrie ou les pairs-aidants. L'empowerment désigne pour un groupe “le fait d’accéder aux moyens d’acquérir les connaissances et les compétences nécessaires à la définition et à la défense de leurs intérêts” (Santé mentale, N° 212, Novembre 2016). Il s’appliquait aux Etats-Unis dans les années 1960 aux groupes stigmatisés tels que les femmes et les peuples indigènes. Il glisse vers le domaine de la santé dans les années 1990 avec les politiques de promotion de la santé, avec pour objectif l’émancipation de chaque individu par lui-même, en gagnant connaissances et compétences, dans un renversement de pouvoir. Le gain de connaissance ici visé ne constitue pas un gain de savoir pour le sujet. La promesse d’un pouvoir sur son existence ne remplace en rien l’élaboration d’une position subjective. Au contraire, en privant le Sujet d’une rencontre avec un soignant on le prive d’une rencontre avec lui-même.